Catégories
LEADERSHIP SANTÉ

« L’attractivité des métiers dans le monde de la santé et du médico-social : de la nécessité de cultiver une véritable politique managériale »

Table-ronde

SANTE

Le 23 juin 2022, la Fédération hospitalière française (FHF) reconnaissait avec discrétion des difficultés de recrutement hétérogènes selon la taille des établissements tout en constatant une hausse globale des effectifs (+3% entre 2019 et 2020). La crise sanitaire a agi comme un catalyseur plaçant comme centrale la question de l’attractivité dans les services et établissements les plus sollicités au sein du système de santé dont certains ont même été contraints de fermer : urgences, aide à domicile, hébergement des personnes âgées.

Dans ce contexte, le cabinet de recrutement YourVoice a tenu à organiser une conférence sur les enjeux de l’attractivité des métiers dans le monde de la santé et du médicosocial à l’occasion de la 16ème édition du Forum National des Associations et Fondations organisé le 20 octobre dernier.

Ce débat ne peut se concentrer sur le seul déficit de rémunération, certes réel, cela reviendrait à occulter le profond mal être du personnel causé par la perte de sens dans leur engagement et un véritable manque de reconnaissance pour le travail. Aussi, loin de tout positionnement idéologique, il est nécessaire aujourd’hui d’observer au sein des différents secteurs (public, privé à but lucratif, privé à but non lucratif) les organisations managériales afin de faire émerger les bonnes pratiques qui permettraient d’attirer les talents et de pourvoir aux besoins importants.

Benoit Péricard, Consultant Senior chez YourVoice, a animé la table-ronde. Dans son propos introductif, il a questionné Denis Piveteau, Conseiller d’Etat et auteur en février 2022 du rapport « Experts, acteurs, ensemble pour une société qui change », sur les leçons portées par son étude et notamment sur le lien entre le pouvoir d’agir des personnes accompagnées et les personnels chargées de cet accompagnement.

Denis Piveteau a tenu à rappeler l’importance que représente l’enjeu du temps : prendre le temps de réaliser les différentes tâches afin de pleinement répondre au pouvoir d’agir des personnes accompagnées.

1. Le recrutement dans les secteurs du sanitaire du médico-social et du social nécessite la construction de réelles stratégies

Nos intervenants sont unanimes : il est nécessaire de mettre en œuvre de nouvelles stratégies de recrutement. En effet, les difficultés ne se concentrent pas uniquement sur le manque de main d’œuvre mais bien sur l’adéquation entre les conditions de travail et les nouvelles attentes des candidats.
Le CDI n’est plus la voie maîtresse car les candidats sont davantage à la recherche de flexibilité : ce qui passe par le recours au CDD ou à l’intérim mais aussi au choix d’un temps de travail bien défini et équilibré avec le temps personnel.

Face à ce nouveau contexte, les recruteurs sont obligés de recourir à des stratégies de recrutement afin de « séduire » les candidats en proposant des parcours de carrière et de la flexibilité sur l’organisation du travail. Ainsi pour Marie-France Begot Fontaine (DG UGECAM IDF) le recrutement demande plus de temps et d’inventivité de la part des recruteurs.

A titre d’exemple, Saïdi Mesbah (DRH VYV3) assure que 1 000 postes restent vacants chez VYV3 et ce malgré des recrutements qui se font bien ; toutefois les candidats optent plus facilement pour des CDD ou des « jobs à la carte ».

Les organisations privées non lucratives restent encore partiellement préservées de cette situation en raison de leurs valeurs fortes et, pour certaines, de la présence des bénévoles sur le terrain.

En Europe, la France n’est pas le seul pays à faire face à cette situation : ses voisins Allemands et Espagnols connaissent des tensions similaires, cependant il est nécessaire de rappeler qu’un infirmier Français est payé 10% de moins que la moyenne de l’OCDE quand les infirmiers européens sont payés 20% de plus.

Thibault Ronsin (DRH Groupe SOS) pointe deux autres difficultés : la fuite des compétences et les limites des cadres conventionnels.
Les contextes d’attractivité diffèrent d’un territoire à l’autre si bien que certains territoires doivent faire face à la fuite des compétences vers des territoires offrant de meilleures opportunités, parce qu’étant plus développés économiquement, culturellement…

Les secteurs sanitaire et médico-sociaux sont très encadrés par différentes conventions et réglementations qui limitent les possibilités en matière d’innovations et d’initiatives. Et même si ces cadres devenaient plus souples, la culture managériale est tellement hiérarchisée qu’elle n’est pas propice à de telles évolutions. A titre d’exemple, le chef de service (dans un hôpital ou un établissement) n’est toujours pas considéré comme un manager.

Aussi, il est impératif d’avoir conscience que la vocation ne suffit plus pour travailler dans ces secteurs, les personnels sont en attente d’évolution et de nouvelles formes de travail. Concrètement, quelles formes ces adaptations doivent-elles prendre ?

2. Quelles sont les initiatives à mettre en œuvre ?

Au lieu de rester dans une position d’attente face au manque de candidats, une piste est d’être proactif en formant ses futurs candidats.
Le Groupe SOS a ainsi créé des centres de formation d’apprentissage afin de déceler ses propres talents avec l’objectif d’aller à la recherche des personnes qui ne seraient pas venues d’elles-mêmes. Ainsi le Groupe travaille avec les quartiers prioritaires de la ville et s’adresse aux jeunes sans diplôme, ni emploi et en-dehors de toute étude.

De la même manière, APF France Handicap met particulièrement l’accent sur l’apprentissage grâce à une dotation de l’ARS Ile-de-France d’1,2M€. Laurence Lecomte (Directrice régionale IDF d’APF France Handicap) rend compte de l’engagement de l’APF pour l’apprentissage qui permet d’accueillir des jeunes talents et d’apporter des nouvelles pratiques au sein des établissements.

Denis Piveteau l’assure « il faut prendre soin de ceux qui prennent soin ». C’est pour lui une des conditions de pérennité et d’adaptation du système de soin (care et cure) aux besoins des personnes prises en charge. Cette attention aux soins des soignants est particulièrement soulignée par Philippe Denormandie, participant au débat, qui fait une sévère autocritique du secteur qui, selon lui, a gravement négligé cet aspect.

Une attention toute particulière doit être portée aux directeurs d’établissement. En effet, les directeurs ont eux-aussi subi la crise sanitaire et la pénurie de personnels et ce dans la plus grande des discrétions. Pour préserver la vocation et l’engagement des directeurs il est impératif de prendre soin d’eux car ils seront les protagonistes du déploiement des futurs projets.

Pour Pascal Duperray (DG de la Fondation Saint Jean de Dieu), la qualité de vie au travail est indispensable pour assurer la qualité de l’accompagnement des personnes vulnérables. Un établissement qui n’aura pas le souci du bien-être de ses salariés aura plus de risques d’instaurer de mauvaises conditions de prise en charge des patients.

Les intervenants s’accordent sur la nécessité de faire émerger les idées du terrain en adéquation avec les spécificités propres à chaque environnement. Il apparaîtrait contre-productif d’imposer un même modèle à l’ensemble des structures, de la même manière et ce en omettant les situations propres à chaque territoire. Cette idée vient toutefois à contre-courant du modèle très hiérarchisé, très « jacobin » des secteurs.

Comme cité précédemment, il est nécessaire de répondre aux besoins de souplesse et de flexibilité et d’instaurer des parcours dans les établissements afin d’offrir des perspectives d’évolution de carrière aux salariés. L’enjeu est que chacun puisse se projeter dans la même structure sans avoir le sentiment de « stagner ».

Pour Denis Piveteau l’amélioration de l’attractivité des métiers du sanitaire et du médico-social ne pourra être réellement efficiente qu’à la condition que la prise en charge des personnes accompagnées s’inscrive dans un projet de société plus global.

3. Comment le secteur tiendra pour les 20 ans à venir ?

Nos intervenants se sont essayés à un exercice prospectif en nous délivrant les clés qui permettront aux secteurs du sanitaire et du médico-social de perdurer dans les 20 prochaines années.

D’une manière générale, chacun s’accorde sur la nécessité de renforcer la communication entre les différents secteurs (privé lucratif, privé non lucratif, public), entre les métiers et de décloisonner le travail avec les différentes instances publiques : tout le monde doit pouvoir se parler.

En complément, chaque secteur devra travailler sur trois enjeux en particulier :
1. Valoriser les compétences acquises par l’expérience et qui ne sont pas justifiées sanctionnées par un diplôme ;
2. Redonner de la confiance dans ces métiers pour donner envie ;
3. Améliorer les conditions matérielles de travail notamment par le déploiement de programmes de rénovation des bâtiments ou par une coopération avec les pouvoirs publics pour développer des solutions de transports ou d’hébergements.

La tâche à venir est rude mais nécessaire car comme l’indique Marie-France Begot Fontaine « nous sommes condamnés à réussir car nous sommes indispensables ».

PARTAGEZ CETTE ARTICLE

Catégories
SANTÉ

« Première ordonnance : une réforme en profondeur de l’avenue de Ségur s’impose »: 10 experts interpellent les ministres sociaux

Tribune

SANTE

« Première ordonnance : une réforme en profondeur de l’avenue de Ségur s’impose »: 10 experts interpellent les ministres sociaux

Contribution

Monsieur le ministre de la Santé et de la prévention,

Monsieur le ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées,

Madame la ministre chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé,

Vos nominations ont recueilli des appréciations élogieuses, au regard de vos parcours, de vos compétences et de vos engagements. Vous allez, dans les semaines et les mois qui viennent, mettre en œuvre les réformes du système de santé, de l’autonomie et de l’inclusion.

Le système de santé, motif de fierté de notre pays au début de ce siècle, est bien qu’il ait fait la preuve de sa résilience lors de la pandémie, souffre. Il est déficient aux yeux d’un grand nombre de nos concitoyens. Deux sujets dominent :

Les déserts médicaux, appellation quelque peu fourre-tout mais qui traduit une réelle difficulté d’accès à l’expertise médicale qui peut conduire à des défauts de soins ;

La pression de l’hôpital public, mais aussi sur tous les établissements, dont la traduction la plus péjorative aujourd’hui est l’absence d’attractivité et la pénurie de compétences.

Malgré les Cassandres et les « Yaka » (traduisez : toujours plus de moyens), les remèdes sont connues. Ils ont été notamment énoncés par le président de la République lui-même dans son discours du 24 septembre 2018, titré « Ma Santé 2022 ». Pour rappel, citons pèle mêle la priorité à la prévention, l’évolution des métiers et la transversalité des prises en charge, la prise en compte de l’expertise des patients, la primauté à l’innovation et à la recherche. Et pourtant, peu de choses ont réellement progressé, le Covid jouant un effet d’accélérateur des problématiques malgré la déferlante pécuniaire du Ségur.

Un jacobinisme tatillon

S’il faut y voir la puissante résistance aux changements des corporatismes, l’envahissante normalisation et bureaucratisation, la concurrence statutaire stérile entre public, privé et non lucratif, il y a une évidence dont vous, ministres chargés de la Santé et des Solidarités, devez vous saisir : votre ministère, vos services, ne sont pas capables de mener  une vraie et efficace réforme.

Fer de lance d’un jacobinisme tatillon, à l’opposé du nécessaire régulateur agile qu’il devrait être, le ministère n’a pas été réformé sérieusement depuis près de trente ans. Constituée de Directions comme autant de silos, l’administration Centrale est faible dans les arbitrages interministériels, concurrencée par la foultitude d’Autorités, de Commissions et d’Agences qu’elle ne régule pas, et se révèle castratrice vis-à-vis des ARS, malades à leur tour de la contagion bureaucratique.

Une réforme en profondeur de « Ségur » s’impose.

Trois mois pour revoir l’organisation

Ce devrait être la mission prioritaire de vos plus proches collaborateurs, directeurs de cabinet, ainsi que du nouveau secrétaire général que vous venez de nommer; appuyés par un groupe réduit d’experts, dénués d’intérêts personnels potentiels et surtout représentatif de l’ensemble du système, à l’exception de  l’administration elle-même ou des corps d’inspection : des acteurs de terrain institutionnels et libéraux, des industriels, des établissements, des patients, des territoires, des start-ups, à qi vous confierez une feuille de route simple : proposer en trois mois une organisation pour un ministère efficace, fluide et agile.

Ce ne sera pas une condition suffisante pour réussir la transformation de notre système de santé et médicosocial mais a minima nécessaire !

Didier Bazocchi (Vice-président du think tank CRAPS), Sophie Beaupere (Déléguée générale d’Unicancer), Nejma Chami (Heand of global medical affairs Grünenthal groupe), Philippe Denormandie (chirurgien orthopédiste, membre du conseil de la CNSA), Olivier Mariotte (Président de Nile), Vincent Olivier (Président de l’agence Recto Verso), Jean-Paul Ortiz (ancien président de la CSMF), Benoît Péricard (ancien directeur de l’ARH Pays-de-Loire et du CHU de Nancy), Isabelle Riom ( interne en médecine à l’AP-HP, présidente du SRP-IMG), Guy Vallancien (Urologue, membre de l’Académie de médecine).

PARTAGEZ CETTE ARTICLE

Catégories
LE MONDE PROFESSIONNEL

Managers, accompagnez vos collaborateurs à trouver un sens dans leur travail !

Edito

LEADERSHIP / MANAGEMENT

Managers, accompagnez vos collaborateurs à trouver un sens dans leur travail !

La crise du Covid-19 a porté à son paroxysme la quête de sens via de nombreuses publications appelant chaque salarié à trouver un sens à son activité professionnelle ou mettant en avant la démission de salariés qui ne trouvaient plus/pas de sens dans leur emploi.

La crise sanitaire, et le nouveau monde qui devait en découler, ont porté un florilège de témoignages de salariés démissionnaires en faveur d’une reconversion totale ou d’un changement d’entreprise porteuse de plus de sens…

Face à la médiatisation de cette quête, qui s’apparente à l’objectif suprême du travail, il est nécessaire de prendre du recul et ne pas faire de la recherche de sens une injonction aux effets pervers.

Concrètement, qu’est-ce que le sens ?

En psychologie, le sens est associé à une expérience personnelle, cohérente et alignée avec la personne qui la vit, si bien que deux collègues pourront exercer le même emploi dans la même entreprise mais avec un sens différent de ce travail.

Ainsi, trouver du sens est un équilibre personnel entre soi, son travail et ses valeurs.

Le sens est intimement lié au sentiment d’utilité perçu par chaque personne. Les sociologues Jérôme FOURQUET, Alain MERGIER et Chloé MORIN ont conduit une enquête[1] auprès de 1 000 actifs français sur le sens et l’utilité au travail. Selon eux, la notion d’utilité s’articule autour de trois dimensions : l’utilité pour soi, l’utilité pour l’entreprise et l’utilité pour la société.

Leur enquête montre que 78% des personnes interrogées se sentent « utiles à la société et à la collectivité », 88% estiment leur travail « utile à leur entreprise » et 38% se sentent plus utiles à leur entreprise qu’auparavant. Nous pouvons aussi ajouter que 70% de Français considèrent leur travail comme très important et 42% estiment que leur accomplissement passe par le travail[2].

En revanche, l’une des problématiques majeures est le manque de reconnaissance car seulement 44% des Français estiment que leur travail est reconnu à sa juste valeur par leur employeur[3].

Dans un quotidien en accéléré, comment trouver du sens dans son travail ? Est-il nécessaire de quitter le monde lucratif pour travailler au sein d’une ONG ou d’une entreprise de l’ESS ?

Accompagnez vos équipes dans leur accomplissement personnel

Bien que personnelle, la quête de sens est un mélange holistique entre la personne, son activité, le projet d’entreprise, mais aussi la reconnaissance qui lui est accordée. Ainsi en tant que manager, votre enjeu n’est pas de trouver le sens du travail de vos collaborateurs mais de déployer les conditions qui permettront à vos équipes de trouver un sens à leur travail et ce indépendamment de votre secteur ou de la typologie de votre structure.

Le sens n’est pas exclusif au monde associatif ou à l’entrepreneuriat à impact, toute organisation peut (et doit) instaurer un cadre d’épanouissement qui permettra à chaque collaborateur de trouver du sens.

 1. (Re)définir l’organisation et le projet de votre entreprise

Les entreprises sont des acteurs économiques investies dans la vie de la Cité. Face à cette période incertaine et ses nombreux défis, il est aisé de perdre la boussole qui anime votre activité. Sans elle, il est d’autant plus facile de se perdre et de ne plus avoir le recul nécessaire sur la conduite de votre activité si bien que votre projet d’entreprise pourrait ne plus être reconnu par vos équipes.

Comment entretenir la motivation et l’envie de vos salariés quand ils n’ont que pour seule raison de travailler leur rétribution financière ?

Pour (re)trouver votre projet et votre « pourquoi » il est nécessaire d’organiser des temps d’échanges avec vos équipes. Les impliquer dans cette réflexion leur permettra assurément d’être les penseurs et les bâtisseurs de votre projet de groupe. Ils se sentiront alors considérés et impliqués dans cette activité souvent réservée aux équipes dirigeantes.

Vous pourriez aussi profiter de cette période pour réfléchir aux externalités positives et négatives de votre activité sur la société et penser à la manière d’améliorer votre impact. Cette démarche vous permettra d’attirer de nouveaux talents et surtout de les fidéliser.

Soyez cohérent et sincère ! L’impact est le fruit d’une réflexion qui s’incarne par des actes concrets et mesurables.

2. Soyez exemplaire

Afin d’inspirer et de mener vos collaborateurs, n’hésitez pas à leur montrer vos propres objectifs, à vous dévoiler en partie tout en donnant à voir sur les objectifs poursuivis par vos équipes. Dans ce contexte, il est intéressant de réaliser une introspection sur vous-même et sur vos managers en interrogeant le management appliqué au sein de votre organisation.

 L’objectif est de savoir si votre management offre la bienveillance et l’espace nécessaire à vos collaborateurs pour échanger sur leurs objectifs et leur appartenance au groupe.

 3. Accompagnez vos équipes dans l’accomplissement de leurs objectifs

63% d’Américains interrogés par McKinsey affirment vouloir que leur employeur leur permette d’atteindre un but dans leur travail[4].

 Avant toute chose, il est impératif de définir des objectifs concrets et adaptés à chaque collaborateur et en accord avec eux. Pour chaque objectif, un plan d’action de suivi devra être établi et un espace d’expression devra être mis en place entre le collaborateur et son manager.

Ces conseils doivent s’appliquer en complément d’une politique de management attentive sur les questions de déconnection, de harcèlement ou encore d’inclusion.

Finalement, accompagner ses collaborateurs dans la quête de sens revient à penser un management humain, suivi et individualisé qui prend soin de ses collaborateurs, tout en portant un projet d’entreprise qui puisse se détacher de la seule vision comptable du monde professionnel.

#sens #impact #management #leadership

[1] Jérôme FOURQUET, Alain MERGIER, Chloé MORIN « Inutilité ou absence de reconnaissance : de quoi souffrent les salariés Français ? », Fondation Jean Jaurès, 2018 / [2] Davoine, Lucie, et Dominique Méda. « Quelle place le travail occupe-t-il dans la vie des Français par rapport aux Européens ? », Informations sociales, vol. 153 / [3] Jérôme FOURQUET, Alain MERGIER, Chloé MORIN « Inutilité ou absence de reconnaissance : de quoi souffrent les salariés Français ? », Fondation Jean Jaurès, 2018 /[4] Naina DHINGRA, Andrew SAMO, Bill SCHANINGER, Matt SCHRIMPER, « Help your employees find purpose—or watch them leave », MacKinsey & Company

PARTAGEZ CETTE ARTICLE

Catégories
INNOVATION

Charles Guépratte, nouveau directeur général pour la FEHAP

Article

NEWS

Charles Guépratte, nouveau directeur général pour la FEHAP

Nouveau directeur général pour la FEHAP, Charles Guépratte succèdera à Antoine Perrin le 14 novembre 2022

En novembre prochain, Charles Guépratte, actuel directeur général du CHU de Nice, succèdera à Antoine Perrin, directeur général de la FEHAP depuis mai 2017. Après cinq années qui furent le témoin de nombreuses batailles, de moments très forts, de grandes joies, de luttes menées avec succès et de difficultés aussi, Antoine Perrin passera le relais à Charles Guépratte dont la mission sera de mener à bien les grands chantiers de la fédération.

L’expertise de Charles Guépratte s’appuie sur une solide expérience acquise dans l’exercice de ses fonctions au sein de postes clés. Après un début de carrière en tant que directeur des achats du CHU de Nancy puis directeur de cabinet du directeur général du CHU tout en assurant l’intérim de la direction du CH de Pont à mousson, il devient conseiller technique pour l’organisation de soins au cabinet de la ministre de la santé et des sports, Roselyne Bachelot. Il participe à l’élaboration de la loi HPST, mais aussi du plan de développement des soins palliatifs et à l’instruction politique des dossiers d’investissements hôpital 2012.

De 2009 à 2016, en tant que Directeur Général Adjoint de Gustave Roussy, il gère un des établissements de lutte contre le cancer emblématique du secteur privé non lucratif. Au-delà de la gestion opérationnelle, il y développe de nouvelles activités comme la filiale Gustave Roussy Internationale, une occasion pour lui de découvrir un secteur agile à la pointe de l’innovation.

Depuis septembre 2016 il occupe la fonction de directeur général du CHU de Nice, mettant en œuvre une politique de coopération territoriale ambitieuse. Il est également président du groupement d’achat UNIHA (1ère centrale d’achat hospitalière) et directeur général de la filiale des CHU French university Hospital International, valorisant l’expertise des CHU à l’international.

PARTAGEZ CETTE ARTICLE

Catégories
INNOVATION

Interview d’Alexandre Telinge, délégué générale d’Entreprises et Médias

Article

IMPACT

Alexandre Telinge, délégué général d’Entreprises et Médias

Dirigeants et futurs dirigeants, cap sur l’impact avec Alexandre Telinge, délégué général d’Entreprises et Médias

Quel est votre parcours professionnel ?

Mon parcours est assez classique. Après une formation en école de commerce, j’ai intégré le monde de l’entreprise où j’ai passé plus de 25 années, dont 15 dédiées à la communication et au marketing. Plus particulièrement, j’ai été directeur de la communication et des affaires publiques de Valeo de 2004 à 2008, puis directeur du Marketing et de la Communication de Philips France et VP Marque et Corporate affairs du groupe Philips.

Depuis 4 ans, je dirige Entreprises et Médias, une association et un think tank réunissant les directrices et directeurs de la communication des 150 plus grandes entreprises de France. Notre mission est de les accompagner dans l’appréhension des mutations que traversent leurs entreprises. Je me nourris également beaucoup de l’enseignement puisque je suis professeur à l’ESSEC depuis 14 ans.

Quel est votre engagement en faveur de la raison d’être des organisations ?

En 2019, la loi Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises (PACTE) a introduit la notion de raison d’être issue des travaux de deux professeurs d’Harvard qui ont démontré qu’une entreprise ne peut durablement gagner dans un monde qui perd. Cela est d’autant plus juste dans un monde en pleine transformation écologique, technologique, économique et sociale. Il est en effet dans l’intérêt de l’entreprise de prendre en compte les doléances des parties prenantes avec lesquelles elle interagit.

« 61 % des Français prêtent aux entreprises le pouvoir de changer le monde. Il est dans l’ordre des choses de réfléchir à leur place dans la société. »

En tant que consultant, j’ai accompagné des groupes et des start-up dans l’élaboration de leur raison d’être. Une étape où trois questions fondamentales sont posées : pourquoi l’entreprise existe-t-elle, de quelle façon agit-elle, et comment contribue-t-elle à rendre le monde meilleur ?

Ces questionnements à la fois philosophiques et économiques donnent à la raison d’être une force intrinsèque qui va lui permettre de s’imposer comme la feuille de route de l’entreprise. Elle est également une composante clé de l’identité de l’entreprise, aux côtés de l’incontournable plateforme de marque (vision, mission, positionnement, valeurs, signature de marque, tone of voice).

La raison d’être du groupe Michelin – « Offrir à chacun une meilleure façon d’avancer » – est une des plus belles que je connaisse. Au-delà de fonder la singularité et l’ambition de l’entreprise, elle est un puissant levier d’engagement, de performance et de transformation. En ligne avec celle-ci, Michelin a, par exemple, décidé de passer de la vente à la location des pneus pour les flottes de véhicules créant une activité circulaire bénéfique pour tous.

Quelles sont les conditions de réussite ?

Définir une raison d’être constitue un exercice difficile. Il vise en effet à affirmer, dans le même temps, la singularité de l’entreprise et sa contribution à l’amélioration du monde. Le plus grand risque est d’adopter une raison d’être trop consensuelle, trop générale.

Après avoir impliqué un large nombre de collaborateurs et éventuellement des parties prenantes externes de l’entreprise, une équipe pluridisciplinaire, souvent animée par la directrice ou le directeur de la communication et accompagnée par une société de conseil, proposera à la direction générale de l’entreprise le résultat de ses travaux. La raison d’être choisie devra alors être incarnée à tous les niveaux de l’entreprise, entraînant chacun à en devenir l’artisan et l’ambassadeur.

En quoi la direction de la communication a-t-elle un rôle central pour rappeler à l’entreprise son rôle dans la société ?

Il faut se souvenir de l’étymologie du mot « communication ». Le verbe latin « communicare » signifie « mettre ou avoir en commun ». La direction de la communication est là pour générer du sens, de la confiance, de l’engagement et contribuer in fine au développement de l’entreprise.

En plaçant la raison d’être au cœur de toutes ses actions, elle réinvente les rapports de l’entreprise avec ses différentes parties prenantes afin de générer des interactions durables et efficaces.

Dans ce contexte, quelles qualités doit aujourd’hui avoir un dircom ?

En plus de connaître l’ensemble des métiers de la communication, être directrice ou directeur de la communication demande de nombreuses qualités : goût pour les relations humaines, diplomatie, ouverture d’esprit, créativité, résilience, « leadership », culture générale… Ces qualités permettent de comprendre le monde dans lequel l’entreprise évolue et de concevoir la meilleure stratégie de communication qui soit.

« L’art d’être tantôt très audacieux et tantôt très prudent est l’art de réussir ». Ce propos de Napoléon pourrait inspirer toute direction de la communication. »

PARTAGEZ CETTE ARTICLE

Catégories
INNOVATION

Interview de Jérôme Schatzman, directeur du CISE de l’ESSEC

Article

IMPACT & INNOVATION SOCIALE

Jérôme Schatzman, directeur du CISE – Centre Innovation Sociale et Ecologique de l’ESSEC

Dirigeants et futurs dirigeants, cap sur l’impact avec Jérôme Schatzman, directeur du CISE – Centre innovation Sociale et Ecologique de l’ESSEC

Quel est votre parcours professionnel ?

Mes débuts au sein de l’entreprise d’insertion La table de Cana m’ont permis d’éprouver qu’il est possible de concilier objectifs sociaux, objectifs de gestion et « fun » (fêtes, événements…). J’ai voulu voir ensuite si cela était applicable à d’autres secteurs, en l’occurrence le prêt-à-porter et le textile, puis à une grand entreprise. Mon fil rouge c’est : « comment utiliser l’activité économique comme un moyen et pas comme une fin ? »

Je suis arrivé à l’ESSEC avec ma double casquette d’entrepreneur social et d’ancien directeur du développement durable de l’Occitane. Aujourd’hui, je dirige le Centre Innovation Sociale et Écologique. Notre rôle : accompagner des entrepreneurs sociaux pour les aider à optimiser leur impact ; faire évoluer la notion de performance pour qu’elle inclut les enjeux sociaux et écologiques ; participer à la formation des futurs dirigeants économiques pour qu’ils intègrent naturellement l’analyse des impacts sociaux et environnementaux à leur prise de décisions.

D’après votre expérience, est-il possible de rechercher de l’impact dans tout type d’organisations ?

La question du temps entre en jeu. La marge de manœuvre est différente entre une entreprise cotée en Bourse jugée sur ses quarter results, un groupe mutualiste fondé pour assurer les gens et non faire du profit, ou encore une ETI familiale qui s’inscrit dans le temps long.

La mère des batailles réside dans la définition de ce qu’est l’impact, de ce qu’est la performance ? À l’instar des réflexions sur le PIB qui n’est pas forcément le plus pertinent pour évaluer le niveau de vie, nous devons définir précisément « ce mieux » que l’on appelle l’impact positif. C’est précisément, depuis 2017, la mission de notre laboratoire d’évaluation d’impact qui propose par exemple des référentiels d’évaluation par secteur d’activité (indicateurs pertinents, méthodologie, exemples…), pour permettre aux entreprises de prendre en main ce grand chantier de la définition de la performance.

« Il s’agit de valoriser l’impact social et environnemental au même niveau que la performance économique et financière. Non pas les opposer mais leur donner la même importance.

Car économie, social et environnement ne sont pas antinomiques. Tout l’enjeu consiste à trouver des systèmes où social et économique sont compatibles, par exemple à travers un modèle tel que l’économie circulaire, ou à travers la valorisation de l’impact positif. L’idéal pourrait être : « plus je crée de l’impact, plus je gagne de parts de marché et plus j’inscris l’entreprise dans le long terme ».

Un autre question fondamentale est : « qui paie l’impact ? » Ce peut être des coûts évités à la collectivité, ou le client final qui consent à payer plus cher, ou encore l’actionnaire qui accepte de moindres intérêts, voire les salariés prêts à baisser leur rémunération car cela a du sens. Dans tous les cas, quelqu’un doit financer cette orientation, si possible celui qui en bénéficie.

Quelles doivent-être, selon vous, les qualités et compétences d’un dirigeant à impact ?

Plutôt qu’un profil type de leader à impact, je préfère parler d’ouverture et de connaissance du monde. J’adore l’approche du Bachelor Act de l’ESSEC « Apprendre à conduire les transitions », qui a pour but de former des dirigeants qui seront les acteurs du changement. En plus de compétences de gestion incontournables – et pas uniquement orientées profit – , ils devront surtout être en mesure de comprendre leurs interlocuteurs dans leur diversité et être en capacité de créer du lien entre des gens très différents.

Cela dépend aussi des roles models qu’on leur donne et qu’ils se choisissent. Il y a quelques années, les dirigeants qui intervenaient dans les écoles de commerce à la rentrée étaient des standards de réussite financière. Aujourd’hui, ce sont des dirigeants qui ont réussi à trouver un équilibre entre leur vie professionnelle et personnelle ou à donner du sens à leur carrière.
Pour autant, je ne pense pas que l’on puisse parler d’une génération de leaders à impact. S’il est certain que la conscience des enjeux sociaux et environnementaux augmente, ils ne représentent pas encore la majorité des profils en école de commerce et les critères de classement des grandes écoles n’intègrent que trop peu ces dimensions.

Aujourd’hui, personne n’ignore ce que sont la RSE et les critères ESG, et c’est tant mieux. Mais si l’on raisonne en cycles, nous sommes passés d’un focus sur la révolution du digital à la prise de conscience du changement climatique et à l’engagement pour l’impact. Désormais, l’IA devient la grande préoccupation. Si tout s’ajoute, c’est super ! En revanche, si une mode en remplace une autre et si les questions de transition sociale et écologique sont oubliées, ce serait catastrophique !

Quelles sont les conditions de succès d’une démarche d’impact positif dans une entreprise ?

Comme pour tout changement, le nerf de la guerre consiste à embarquer les équipes dans le projet en les rassurant d’une part, et en leur montrant comment ils seront en mesure d’atteindre leurs objectifs d’autre part, que ces objectifs soient économiques, financiers, d’image ou d’attractivité. S’inscrire en donneur de leçon ne fonctionne pas.

Une manière de faire pourrait être, par exemple, de dire : « nous allons travailler d’une autre manière et cela va alimenter notre marque employeur, donc nous faire gagner un temps considérable dans les délais de recrutement. » Ou bien : « valoriser nos impacts positifs contribuera à fidéliser nos clients ». Ou encore : « de nouvelles normes vont arriver, mieux vaut être pionnier que suiveur, anticiper que subir. »

PARTAGEZ CETTE ARTICLE

Catégories
ÉVÉNEMENT

Interview d’Alexandra Barrier, Secrétaire générale et conseillère handicap à la Délégation interministérielle aux JOP 2024

Article

Jeux Olympiques et Paralympiques 2024

Alexandra Barrier, Secrétaire générale et conseillère handicap à la  Délégation interministérielle aux JOP 2024

Alexandra Barrier, Secrétaire générale et conseillère handicap, Délégation interministérielle aux Jeux Olympiques et Paralympiques 2024

Rattachée aux services du Premier ministre, la Délégation interministérielle aux Jeux olympiques et paralympiques (DIJOP) compte une vingtaine de collaborateurs dédiés à l’organisation et à la construction de l’héritage des Jeux. Véritable relai entre les parties prenantes, la DIJOP coordonne l’action des différents ministères concernés et collabore avec Paris 2024 (l’association de loi 1901 organisatrice de l’évènement), le Comité National Olympique Sportif Français, le Comité Paralympique sportif français, ainsi que les collectivités hôtes de l’évènement telles que la Ville de Paris, le département de la Seine-Saint-Denis. La délégation veille au suivi de chaque sujet, en orchestre le calendrier d’exécution et œuvre au développement de mesures qui resteront en héritage des JOP comme dans le domaine du handicap et de santé, pour lesquelles Alexandra Barrier est investie en qualité de conseillère Handicap et Santé en plus du Secrétariat général de la DIJOP qu’elle assure.

1.Quelles sont vos ambitions en matière de visibilité sur le handicap durant les Jeux ?

Les premiers Jeux Paralympiques datent de 1960 et 84 années après, nous avons pour ambition de ne pas réduire la question du handicap à la seule dimension paralympique des Jeux, mais qu’elle irrigue l’ensemble de cette année olympique. Comme le Gouvernement s’y est engagé, Paris 2024 doit être un accélérateur de changements pérennes pour une meilleure inscription des personnes en situation de Handicap dans la cité. La réalisation de cette ambition passe par l’enjeu de l’accessibilité, un sujet sur lequel nous travaillons étroitement avec les acteurs du transport évidemment mais aussi ceux du tourisme, les collectivités hôtes pour mettre en œuvre les travaux nécessaires d’ajustement de la voirie et Paris 2024 en vue de créer une expérience spectateur réussie qui marque durablement la société française.

Active depuis plusieurs années au sein du secteur du handicap, c’est un sujet qui m’est cher et j’ai eu la chance de trouver, en la personne du Délégué Interministériel aux Jeux Olympiques et Paralympique, le Préfet Michel Cadot, une autorité très investie sur la question. Ainsi, nous avons créé en mars 2023 un groupe d’experts-usagers, composé de 15 personnes en situation de handicap, tout type de handicap, afin d’expérimenter les propositions d’accessibilité aux sites, de tester des cheminements, d’identifier des pistes d’amélioration et de proposer des modifications en matière d’accessibilité des transports pour les JOP. A titre d’exemple, nous nous sommes rendus aux Internationaux de France de badminton dans la nouvelle enceinte de l’Arena La Chapelle. Cet évènement nous a permis de mesurer l’accessibilité du site et de la voirie dans la configuration des Jeux, de réaliser des tests de transport dont les navettes mis en place par IDFM pendant les JOP, d’expérimenter les fouilles au corps et de notifier les éléments à améliorer. Associer un groupe d’experts d’usage dans les conditions réelles, a constitué une méthode nouvelle au sein de l’Etat, qui, forcément, dans un premier temps, a pu déstabiliser certains acteurs, mais je crois qu’aujourd’hui, plus personne n’imaginerait ce type d’événement sans les associer pleinement, ce qui constitue je crois d’ores et déjà un héritage important des Jeux.

En septembre 2023, s’est tenu un comité interministériel sur le handicap où la Premier ministre et les opérateurs ont signé une charte d’engagement sur dix mesures réalisables d’ici les JOP. Ces mesures visent notamment à améliorer la sonorisation du métro, à développer une sensibilisation au handicap pour les chauffeurs de taxi et de VTC et grâce à un soutien financier de l’Etat, à multiplier par 4 la flotte de taxis accessibles en IDF.

Le Groupe ADP a aussi considérablement fait évoluer ses pratiques en sensibilisant l’ensemble de la communauté aéroportuaire à la question du handicap, en se dotant d’un comité consultatif du handicap, en créant 8 salles de changes à Orly et Roissy et en adaptant ses infrastructures. Aujourd’hui, les fauteuils roulants sont placés en soute dès l’enregistrement, demain les personnes en fauteuil devraient pouvoir se rendre jusqu’aux portes de l’avion avec leur fauteuil personnel, c’est un changement considérable qui est en cours. Enfin, pour les villes hôtes, l’Etat a réservé 100 millions d’euros au Fond territorial d’accessibilité pour leur permettre de rendre accessible des hôtels, des commerces et des services. L’ensemble des lieux accessibles seront référencés sur la plateforme collaborative (https://acceslibre.beta.gouv.fr/) permettant ainsi aux personnes en situation de handicap de préparer leurs sorties ou trouver leurs hébergements accueillants et adaptés.

Par ailleurs, l’Etat et Paris 2024 se sont engagés à recruter 3 000 bénévoles en situation de handicap parmi les 45 000 bénévoles qui participeront aux JOP. Lors de ma prise de poste, j’ai repris ce programme de volontariat et nous avons travaillé avec une vingtaine d’associations, telles que APF France Handicap, l’Arche en France, Vivre et Devenir, la Fondation des Amis de l’Atelier le GROUPE SOS et bien d’autres encore, pour recruter les 3 000 bénévoles. En parallèle, tous les bénévoles et salariés de Paris 2024 seront sensibilisés à l’accueil des personnes en situation de handicap.

Pour conclure, cette stratégie s’incarne autour de trois enjeux majeurs :
> L’accessibilité universelle de l’arrivée sur le territoire jusqu’au siège dans le site olympique;
> Le développement du para-sport avec notamment l’objectif d’atteindre le nombre de 4 000 clubs inclusifs sensibilisés et prêts à accompagner la pratique sportive des personnes en situation de handicap ; La baisse du taux de TVA pour le matériel sportifs adaptés ou encore le triplement du budget de l’Agence nationale du sport dédié au financement de la mise en accessibilité des équipements sportifs.
> La visibilité globale sur le handicap grâce aux 300 heures de rediffusion des épreuves paralympiques, au bénévolat- des personnes en situation de handicap, aux journées paralympiques organisées en 2022 et 2023 et à l’exposition qui se tiendra au Panthéon sur l’histoire des Jeux paralympiques.

2. Comment mesurer l’impact des Jeux Olympiques et Paralympiques ?

L’Etat a lancé 13 études destinées à évaluer l’impact avant, pendant et après les Jeux. L’une d’entre elles permettra de valoriser les avancées et les usages en matière d’accessibilité des infrastructures grâce aux JOP.
Avec la direction générale de l’aménagement du territoire, nous avons décidé d’élargir l’étude aux impacts dans le secteur des transports et de valoriser les évolutions dans la prise en compte de l’accessibilité dans les organisations.
Cette étude d’impact a débuté cette année et combinera de l’analyse documentaire, le suivi d’indicateurs et des tests d’usage.

Mesurer objectivement l’impact des Jeux est une première, si bien que nous ne disposons pas d’historique d’études similaires conduites après d’autres Jeux. Cette démarche engagera à la fois l’Etat, les principaux acteurs mais aussi la population.

3. Le lancement des Jeux se rapproche, comment se déroule son organisation ?

Nous sommes tous à pied d’œuvre pour permettre que les Jeux se déroulent dans les meilleures conditions et que l’évènement soit une réussite. Je reste bien sûr consciente qu’une bonne organisation n’empêchera pas les impondérables.

Sur l’accessibilité, il faut avoir à l’esprit que nos infrastructures sont anciennes, et donc nous agirons jusqu’au dernier jour pour rattraper une partie du retard considérable qui a été pris. Ainsi de nombreux travaux sont toujours en cours comme sur le RER E ou la ligne 14 du métro.

Concernant la santé, domaine sur lequel je suis également très investie, il s’agira de prendre en compte les tensions existantes dans ce secteur pour répondre aux besoins sans déstabiliser des organisations déjà fragiles. Nous travaillons avec le ministère de la santé, les ARS ou encore l’AP-HP pour nous préparer au mieux à l’évènement. C’est une mission considérable. Nous souhaitons aussi favoriser le sport-santé. A cet effet, le programme 30 minutes d’activité physique quotidienne dans les écoles a été déployé et de nombreux financements seront engagés dès cette année pour étendre cette mesure aux Etablissements sociaux et médicosociaux qui accueillent des enfants en situation de handicap.

J’entends les réserves formulées par voie de presse, et nous y sommes tous sensibles, mais je crois qu’il est aussi important de mesurer l’étendue du chemin parcouru. Je crois en l’héritage des Jeux.

Les JOP seront aussi, j’en suis convaincue, une belle fête populaire, un moment suspendu où le monde regardera la France. Participer à des exploits sportifs dans les lieux emblématiques tels que le volley aux pieds de la Tour Eiffel, l’équitation aux Château de Versailles, l’escrime au Grand Palais, constituera des moments inoubliables tant pour les spectateurs des Jeux Olympiques que des jeux Paralympiques.

4. Quels liens entretenez-vous avec l’ESS ? Les associations engagées sur le handicap sont-elles parties prenantes dans l’organisation des Jeux ?

Comme je viens du secteur associatif, j’ai pu arrimer un certain nombre d’associations du secteur du handicap à nos travaux. Elles interviennent à plusieurs niveaux : certaines interviennent à travers des usagers au sein du groupe d’expert d’usage, d’autres sont partie prenante du programme bénévolat, d’autres encore sont investies sur l’attribution de la billetterie populaire : 400 000 billets dont 17 640 pour des personnes en situation de handicap. Par ailleurs, je coanime chaque trimestre, aux côtés de Paris 2024, une réunion d’information sur l’actualité des jeux à destination des associations du handicap.

« Je pense sincèrement que les Jeux sont un accélérateur de mise au premier plan de l’accessibilité. Nous n’avons jamais autant parlé et traité du sujet en France. »

 

« Beaucoup est fait pour les personnes en situation de handicap et cela serait dommage qu’elles ne viennent pas à cette fête. »

5. Que retenez-vous de la culture du Groupe SOS ?

J’ai intégré le Groupe SOS à 25 ans, et j’ai eu la chance d’y évoluer à différentes fonctions, d’acquérir rapidement des responsabilités nouvelles, et de découvrir des champs importants des politiques publiques de la grande précarité au handicap en passant par l’hébergement/logement. A travers le Groupe SOS, j’ai pu m’immerger dans tout un écosystème qui inclut les organismes gestionnaires de dimension nationale qui jouent un rôle essentiel dans la mise en œuvre de missions d’intérêt général mais aussi des acteurs de taille plus modeste qui ont un pouvoir d’innovation considérables. Je suis ainsi extrêmement liée et attachée aux Bobos à la ferme, qui développe des gites inclusifs et qui offrent des séjours de répit pour les aidants et personnes en situation de handicap. Cette diversité du secteur associatif est un atout pour notre société.

6. Quelles motivations vous ont conduites à travailler dans le secteur de l’ESS et le handicap ?

J’ai toujours voulu travailler pour l’intérêt général. Je suis quelqu’un d’engagée et j’ai rapidement su que l’ESS était fait pour moi. Cela fait huit ans que je travaille dans le domaine du handicap au sein du milieu associatif ou pour le compte de la DIJOP : je me réjouis des petits pas effectués pour une meilleure prise en compte du handicap dans notre société et je m’épanouis au sein d’une communauté d’acteurs investie. Mais je reste très préoccupée par les insatisfactions légitimes éprouvées par les personnes en situation de handicap et leurs familles, qui sont génératrices de tant d’injustice. Mon envie est, à la place que j’occupe, de contribuer à relever ce défi de justice sociale. Il s’agit du moteur principal de mon engagement.

7. Quelle serait la prochaine étape de votre parcours ?

Ma mission étant bornée dans le temps, je me retrouve à un carrefour où j’hésite entre retourner dans le secteur associatif ou poursuivre en faveur de l’action publique, pour le compte de l’Etat ou d’une autre administration. Ce qui est certain c’est que je m’engagerai là où je me sentirai utile, où je pourrai faire progresser des projets et contribuer à répondre aux grands défis de notre société.

Alexandra Barrier entre au sein du Groupe SOS à un poste de cadre au sein de la délégation régionale Ile de France du Groupe SOS, avant d’être promue directrice générale adjointe de la filiale Habitat et Soins, poste qu’elle occupe un peu moins de 8 ans. Elle continue son parcours exceptionnel au sein du Groupe à la direction générale Handicap en 2016. Après 16 ans de bons et loyaux services pour le Groupe dirigé par Jean-Marc Borello, elle est nommée en 2022 Secrétaire Générale – Conseillère Handidap et Santé de la Délégation interministérielle aux Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 (DIJOP).

PARTAGEZ CETTE ARTICLE

Catégories
LE MONDE PROFESSIONNEL

Interview de Tahnee Perrot-Ramirez, Fondatrice de Balanced France

Article

LE MONDE PROFESSIONNEL

Tahnee Perrot-Ramirez, fondatrice de Balanced France

Tahnee Perrot-Ramirez, ancienne directrice des opérations chez Make.org, est entrepreneure, créatrice de Balanced France et professeure de yoga

A l’heure où garantir un équilibre de vie professionnelle et personnelle devient un prérequis pour les salariés et subséquemment un véritable défi pour les employeurs, Tahnee Perrot Rodriguez aborde la gestion de l’équilibre sous l’angle de la compétence professionnelle reposant sur une compréhension approfondie et la bonne gestion des besoins physiologiques et psychologiques essentiels. Avec son entreprise Balanced France, elle conseille et forme les dirigeants et les collaborateurs à l’échelle individuelle et collective pour faire de l’équilibre un pilier d’un bien-être et d’une performance plus durables.

1. Que signifie la notion d’équilibre ? Que proposez-vous chez Balanced France ?

La notion d’équilibre au travail n’est pas nouvelle. Elle est étudiée dans le monde anglosaxon dès le début du XXème siècle. Dans les années 70, avec la tertiarisation de l’économie, s’est développée la notion d’équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle. Et un nouveau paradigme semble émerger depuis la crise sanitaire et son impact sur une partie du monde du travail. Les évolutions du travail apportent de nouvelles interrogations.

Les chiffres témoignent d’un véritable déséquilibre de la santé physique et mentale dans la population française : près d’un salarié sur deux vie avec un stress chronique et neuf français sur dix sont trop sédentaires. Cela se traduit notamment par l’accroissement des risques psychosociaux et des troubles musculosquelettiques dont le coût moyen s’élève chaque année à 5 milliards d’euros rien que dans les grands groupes, sans compter les enjeux autour de l’engagement.

« La gestion de l’équilibre repose sur notre capacité à comprendre et adresser nos besoins physiologiques et psychologiques essentiels malgré les aléas du quotidien”

Car on ne trouve pas son équilibre, on le construit au quotidien en s’adaptant à des contextes et environnements changeants. Nous distinguons des habitudes quotidiennes (alimentation, sommeil, mobilité, gestion des émotions, …) des ajustements à réaliser dans les périodes à forte intensité de manière à soutenir un système nerveux sursollicité. L’objectif in fine est de réagir avec intelligence face aux moments de déséquilibre ou difficultés, dans l’optique d’éviter les 4 « B » : burnout (épquisement physique et moral), brownout (état de désengagement professionnel du salarié qui ne se sent plus en phase avec son travail, sa mission, son entreprise), boreout (syndrome d’épuisement professionnel par l’ennui et le manque d’accomplissement et de sens) et blurout (hyperconnexion affectant négativement vie professionnelle et vie personnelle).

Si la carrière professionnelle est souvent vécue comme un long sprint où le stress est objet de paradoxe (valorisant d’une part, signe d’échec d’autre part), Balanced encourage la création d’une culture du marathon dans les entreprises, découpée en périodes de sprint, de vitesse de croisière et de récupération. À chacune de ces phases, correspondent des besoins prioritaires et des enjeux. Ce sont dans les périodes d’intensité que l’on encouragera une équipe à soutenir son système nerveux individuellement, valoriser chaque étape collectivement et favoriser le maintien de conditions favorables au bien être et à la performance durable de chacun malgré l’intensité. De la réunion débout, aux sessions de sport spécifiques aux périodes de rush, à l’alimentation, nombreux sont les outils promus par les neurosciences et la psychologie qui sont à explorer pour repenser son rapport aux périodes de stress.

Notre mission chez Balanced France c’est de faire reconnaître cette compétence à tous les niveaux de séniorité pour favoriser une démarche de co-responsabilité entre salariés et dirigeants et ainsi soutenir un rapport plus durable à la notion de performance. Pour cela, nous formons à la gestion de l’équilibre comme à toute compétence reposant sur des connaissances, des aptitudes et des attitudes à développer tout au long de sa carrière.

2. A quelles populations vous adressez-vous ?

Appuyés par notre collectif de 45 professionnels (neuroscientifiques, consultants, professionnels de santé, …) nous accompagnons les dirigeants et les collaborateurs d’organisations de toutes tailles dans l’acquisition de cette compétence par la découverte et la compréhension des fondements de leur propre santé physique et mentale.

« Nous remarquons que ce sont plutôt les dirigeants qui nous sollicitent et non les professionnels des ressources humaines. »

Au-delà de nos formations, nous accompagnons ces dirigeants dans le cadre de mentorat favorisant une réflexion beaucoup transverse sur la place de l’équilibre dans la mission, les valeurs et le quotidien de l’entreprise. Les dirigeants se saisissent de ce sujet certainement parce qu’ils se sentent eux-mêmes très concernés et se questionnent sur leur modèle de performance et de croissance..

Il existe différentes situations en fonction de l’organisation et du dirigeant. Certains dirigeants de startup vont s’interroger sur la manière d’entreprendre « sans se cramer » parce qu’ils ont déjà connu ou frôlé le burn-out. Les dirigeants de PME en phase de croissance sont conscients qu’ils vont demander plus de travail à leurs équipes et ils ont besoin d’être outillés pour cela. Les dirigeants des grands groupes sont issus d’une culture de travail extrêmement intense qu’ils ne souhaitent pas reproduire.

« Les dirigeants accompagnés ont plutôt 40/50 ans, ils sont à la croisée générationnelle après avoir connu des carrières à très haute intensité avec de fortes ambitions. Ils vivent une véritable prise de conscience et souhaitent transmettre d’autres valeurs. »

Ce sont des dirigeants qui veulent incarner cette méthodologie, l’inscrire dans l’ADN de leur organisation et s’assurer que leurs collaborateurs ne connaîtront pas ce qu’eux-mêmes ont vécu. Ils voient les fragilités intrinsèques à vision purement linéaire de la performance. La notion de compétence aussi attire beaucoup, contrairement aux QVTC qui sont très verticales.

3. Qu’est-ce qu’un leader d’impact pour vous ?

Plus qu’une personne osant voir plus grand, je vois dans le leadership un rôle d’ingénieur social qui s’intéresse et détermine les conditions de réussite qui permettent à une équipe ou à une communauté d’avancer vers ce grand projet qu’il ou elle porte.

Il veut faire bouger les lignes tout en étant lucide qu’il ne peut y arriver seul. Doté d’une véritable puissance de conviction, d’une intelligence humaine, émotionnelle et situationnelle, et d’une profonde humilité, il ou elle connaît ses forces et ses faiblesses. Il possède un côté idéaliste assumé, avec évidemment beaucoup de pragmatisme, il s’autorise à rêver et à avoir des ambitions, parfois conscient qu’il n’en a pas les moyens dans l’immédiat.

La notion d’équilibre prend pour lui tout son sens en raison de cette ambition, c’est que nous disent les théories des ressources cognitives sur l’importance d’une bonne gestion du stress chez le leader. Ils sont tellement investis qu’ils peuvent facilement s’oublier, mais l’oubli de soi à un coût. Ce rapport sacrificiel peut faire que l’aventure s’arrête ou se passe moins bien. Cette notion d’équilibre est d’autant plus importante pour eux s’ils souhaitent que leur projet s’inscrive dans la durée.

Tahnee Perrot Ramirez est franco-mexicaine. Diplômée de SciencesPo, après des débuts dans la diplomatie, elle entreprend une carrière dans le conseil chez PwC, puis dans l’entrepreneuriat social chez Make.org, et n’a de cesse de vouloir se rapprocher « du terrain » comme elle dit. D’ailleurs, en même temps qu’elle professe à ses clients le génie de l’intelligence collective, elle se forme à la neurobiologie et aux neurosciences, ainsi qu’à la yogathérapie. C’est à la demande d’un dirigeant, qu’elle s’essaye à l’accompagnement, puis au fil de 5 ans d’accompagnement de professionnels et en particulier de dirigeant, qu’elle conçoit cette notion de gestion de l’équilibre à travers la méthode Balanced at work qui regroupe neurosciences, psychologie positive et outils psychocorporels.

PARTAGEZ CETTE ARTICLE

Catégories
ÉDUCATION

Interview de Caroline Dulauroy, Directrice générale déléguée en charge des programmes chez Article 1

Article

EDUCATION

Caroline Dulauroy, Directrice générale déléguée en charge des programmes de l’association Article 1

Caroline Dulauroy, ancienne directrice Stratégie, pilotage et écoute client chez EDF, aujourd’hui directrice générale déléguée en charge des programmes de l’association Article 1.

Quitter une voie toute tracée et le giron d’un fleuron français. Écouter son cœur et combler un besoin d’utilité pour changer la donne. C’est le parcours inspirant de Caroline Dulauroy que nous avons interrogée 6 mois après son grand saut dans l’ESS, une nouvelle étape savamment préparée.

1. Quel est votre parcours professionnel ?

J’ai suivi un parcours assez classique et mené l’essentiel de ma carrière au sein d’EDF à des fonctions marketing et commerciales. L’avantage des grands groupes est d’offrir des possibilités d’évolution et de carrière assez variées. Cela permet de vivre plusieurs vies au sein d’une même entreprise mais, au fond, dans un même cadre rassurant.

Lorsque j’ai pris la décision de changer de cap, je considérais que j’avais accompli des choses passionnantes, dans un univers que j’aimais beaucoup, avec un niveau de responsabilités satisfaisant. Pourtant, je ne voyais pas très bien quelle serait l’étape suivante.

« Est-ce que je reste dans ce sillon tout tracé ou bien, est-ce que je m’oriente vers autre chose, vers une autre partie de carrière dans un environnement différent ? »

2. Ce choix a-t-il étonné votre entourage professionnel ?

Mon choix a étonné, oui et non. Certes, il n’est pas fréquent qu’un dirigeant d’EDF quitte le groupe. En revanche, mon entourage proche, y compris professionnel, connaissait mes aspirations et les sujets qui me tiennent à cœur, comme la transition écologique.

En réalité, j’ai procédé par étape, avec une première parenthèse en 2018, l’occasion d’un premier contact avec l’ESS qui m’avait énormément plu, ainsi qu’une incursion dans le domaine de l’égalité des chances auprès d’une association de mentoring de lycéens. Dès lors, j’avais touché du doigt que je pouvais faire autre chose.

Je suis revenue à EDF car on me proposait un poste passionnant. Peut-être n’était-ce pas encore le bon moment pour moi… Pendant 4 ans, j’ai mûri mon projet. Aussi, quand j’ai annoncé que je quittais EDF pour me mettre en recherche d’un projet à impact auquel je pourrais apporter ma contribution, cela n’a pas suscité trop d’étonnement de la part de mes proches. De mon côté, j’ai abordé cette période sereinement car j’avais conscience du besoin de compétences important de l’ESS. Puis, j’ai eu la chance de rencontrer Luc Meuret du cabinet YourVoice et, bien sûr, Benjamin Blavier et Boris Walbaum, les présidents fondateurs d’Article 1.

3. Quel est votre rapport d’étonnement après 6 mois ?

J’avais en tête l’écart entre un grand groupe et une organisation de l’ESS en termes de contexte de travail, d’ambiance et de méthode. Cela s’est vérifié. Ceci dit, je suis contente d’avoir rejoint Article 1, qui connaît une phase de très forte croissance depuis 3 ans. Au quotidien, je constate un engagement collectif et une envie de faire avancer les choses très porteurs. Par ailleurs, bien que les sujets soient différents, les problématiques sont similaires, notamment la réflexion marketing à avoir ou le besoin de structuration.

« De fait, je mobilise mes expériences et compétences passées
au profit d’une thématique nouvelle. »

Évidemment, c’est un changement de vie et je dois me débarrasser de certains modes de fonctionnement. Parfois, l’environnement de travail me rappelle à l’ordre ! A contrario, ces réflexes peuvent aider à structurer les choses. J’apprends aussi beaucoup sur le monde associatif, à commencer par la problématique de financement. Et je n’ai pas fini d’apprendre !

4. Quels sont vos conseils pour réussir une telle transition ?

J’avais préparé les choses en amont. Avant de quitter EDF, pendant 9 mois, j’ai rencontré des acteurs de l’ESS pour tester mon projet et identifier les sujets avec lesquels j’avais le plus d’accroche, tant en termes de profil que de centre d’intérêt. J’avais en tête que je ne trouverais peut-être pas du premier coup. Finalement, tout s’est fait très vite.

Un point important à anticiper pour ne pas tomber dans une forme d’impasse concerne l’aspect financier. J’ai pu bifurquer car je suis dans une situation confortable et je suis à un stade de ma vie où mes enfants sont grands, avec moins de choses à payer… Le changement n’est pas négligeable, à tel point qu’en général, c’est la 2ème question qu’on me posait.

5. Au sein d’Article 1, vous contribuez à l’ODD n°4 des Nations Unies pour l’accès à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité et l’apprentissage tout au long de la vie. Ressentez-vous votre impact au quotidien ?

Fondamentalement, ce nouveau virage répond à un besoin profond d’utilité sociale et sociétale. Mon but était d’atteindre une position avec le moins de dissonance possible entre mes convictions et mon quotidien. Déjà au sein d’EDF, je travaillais pour un acteur engagé sur le volet environnemental.

« J’ai l’impression de reprendre la main sur l’impact que je peux avoir
et ce que je peux apporter. Mon action est moins diluée dans une structure imposante, moins dépendante d’un contexte politique et réglementaire. »

Quand on commence à réfléchir à la façon de rendre notre monde meilleur, on arrive rapidement sur les sujets d’éducation et d’égalité des possibles. Concrètement, nous pouvons agir auprès d’un réservoir précieux de jeunes, pour les aider à trouver et réussir le parcours scolaire qui leur ressemble. Et peut-être demain, contribuer à la transition écologique, pour faire le lien avec ce sujet qui m’est cher. Même si mon action est indirecte – car je suis à un poste de management, ce n’est donc pas moi qui côtoie ces jeunes au quotidien –, je contribue à améliorer leurs chances et potentiellement, leur impact futur. C’est exactement ce que je recherchais.

PARTAGEZ CETTE ARTICLE

Catégories
RECHERCHE

Interview d’Alexis Vandevivère, Directeur du développement des ressources et de la communication de la Fondation pour la recherche médicale

Article

FUNDRAISING

Alexis Vandevivère, directeur du développement des ressources et de la communication de la Fondation pour la recherche médicale

Alexis Vandevivère, ancien directeur fondateur du bureau parisien de l’agence Adfinitas, nouvellement directeur du développement des ressources et de la communication de la Fondation pour la recherche médicale

Alors qu’il signe un retour aux sources – car il n’a jamais vraiment quitté le secteur associatif –, nous avons demandé à Alexis Vandevivère de revenir sur son parcours et de nous livrer son rapport d’étonnement trois mois après sa prise de poste à la Fondation pour la Recherche Médicale. Une trajectoire professionnelle, passée pour « presque » moitié en association (13 ans) et en agence (16 ans), au cours de laquelle il est beaucoup de question de chance saisie et de liberté.

1. Quel est votre parcours professionnel ?

En tant que donateur, mon papa lisait le magazine Amnesty international, ce qui a développé, je crois, ma sensibilité au secteur associatif assez tôt. Rapidement au lycée, j’ai milité contre la peine de mort en animant des débats. J’ai suivi des études de Marketing et communication dans l’espoir de concilier vie professionnelle et engagement associatif. Après un premier stage, j’ai travaillé pour AIDES en tant qu’objecteur de conscience, puis salarié. Après un bref passage au Secours catholique où je ne me suis pas plu, j’ai rejoint les Petits frères des pauvres pour m’occuper de la collecte de fonds. Une organisation dans laquelle j’ai adoré travailler. À cette époque, je suis devenu administrateur du Don en confiance et de France générosité. Puis, Daniel Bruneau m’a proposé de prendre la direction de la collecte de fonds de l’APF, une proposition qui ne se refuse pas, encore moins à 30 ans !

Au bout de 6 années couronnées de beaux résultats, je me suis interrogé sur la suite. « Est-ce que j’allais enchaîner les associations toute ma vie ? Qu’est-ce que je pouvais faire d’intéressant et qui ait du sens ? » J’ai eu beaucoup de chance et j’ai saisi la perche que m’a tendue Adfinitas, une agence lilloise, jusque-là plutôt spécialisée dans le conseil aux ONG internationales, notamment d’origine américaine, qui souhaitait ouvrir un bureau parisien. Je n’avais jamais travaillé en entreprise, ni été confronté à la problématique de rentabilité… J’ai démarré tout seul à Paris et l’histoire a duré 16 ans. Après avoir gagné Action contre la faim, tout est allé très vite. J’ai embauché, l’agence s’est développée et je suis devenu associé.

En 2022, j’ai profité du changement d’actionnaire majoritaire pour partir. D’une part, j’avais le sentiment d’avoir rempli largement ma mission. D’autre part, un grave souci de santé de mon épouse m’avait un peu coupé les jambes. Si bien que j’ai fait une pause de 9 mois, avec la ferme volonté de retourner dans l’associatif. Compte tenu de notre épreuve familiale, j’ai vu le poste à la Fondation pour la recherche médicale (FRM) comme un signe.

2. Ce choix a-t-il étonné votre entourage professionnel ?

En réalité, c’est le passage en agence qui a le plus étonné. J’ai d’ailleurs toujours dit que je retournerais dans le monde associatif. Mais à l’époque, ce choix de l’agence a fait douter. En quelque sorte, je rejoignais le côté sombre de la force. Cela a suscité une sorte de méfiance au début. Adfinitas avait été séduit, justement, car j’avais le verbatim pour parler aux acteurs associatifs.
La liberté est sans conteste la valeur clé qui a toujours guidé mon parcours. On ne me retient pas avec des promesses d’argent ou de pouvoir. Alors que je doutais d’y arriver, les dirigeants d’Adfinitas m’avaient assuré de leur confiance et s’étaient engagés à respecter mon individualité et mon style associatif. C’est ce qui m’avait convaincu. À mon sens, c’est assez imparable : quand on écoute son instinct, quand on suit son envie, on se trompe peu. Passer de dirigeant d’agence à directeur en association n’est pas une question d’argent ou de pouvoir, mais de joie et de plaisir.

Je dirais que le choc est plus dur maintenant car je me suis habitué à la liberté du dirigeant. J’avais monté une équipe de toute pièce, sans doute formatée à mon image… Aujourd’hui, je retrouve une organisation installée, assez institutionnelle, avec toute la complexité liée au statut de fondation. Toutefois, j’ai été rassuré par la fondation, plutôt heureuse de mon côté « poil à gratter », qui m’encourage à conserver mon regard neuf, le goût du challenge découvert en agence et surtout, ma liberté de ton pour proposer des choses nouvelles.

« Donc oui, il y a un peu de contrainte mais je renoue avec mes premiers amours. Et pour le moment, la FRM est contente du petit vent de liberté que j’insuffle à l’organisation. »

3. Quels sont vos conseils pour réussir une telle transition ?

Depuis ma prise de fonction, je m’évertue à ne pas rentrer dans le moule. Je dois prendre un peu sur moi car je pourrais être tenté de me faire discret… La liberté est une promesse forte de la part de la fondation, presque un petit risque pour une institution française aussi respectée. Ceci dit, si le grand public a une vision plutôt classique de la FRM, du côté des chercheurs, c’est la modernité qui l’emporte. C’est là tout l’enjeu en termes d’image, il me semble. L’équipe aussi est heureuse de cette liberté de ton gagnée en agence. Le fait que quelqu’un la porte et la diffuse apporte vivacité et dynamisme dans un écosystème où habituellement les gens s’affranchissent difficilement d’un style « statutaire ».

Tout oppose la vie en agence et celle en association mais les deux expériences sont très complémentaires. Une association est éminemment politique tandis que l’agence est dans le registre de l’efficacité. Forcément, les apports se font dans les deux sens. L’agence, c’est la culture de « la solution à tout », de la créativité et de la performance. En revanche, l’agence a tendance à sauter d’une cause à une autre alors qu’en association, nous allons au fond de la mission sociale, des statuts… De ce côté-ci, nous avons vraiment la vision de notre impact, par exemple, lorsque nous soutenons un projet de recherche. Je suis formateur au Don en confiance et j’ai l’habitude de dire : « une association ne se crée pas pour collecter mais pour remplir une mission sociale. L’argent vient après. »

« Aujourd’hui, j’essaie de mettre en musique le meilleur des deux cultures.
Ma capacité à analyser la mission de la fondation, à gérer le bon discours et à naviguer au sein de la gouvernance ; et ma faculté à faire bon usage de ma liberté, à créer en permanence et à sortir des frontières. »

PARTAGEZ CETTE ARTICLE