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Interview de Florence Rizzo, Co-fondatrice & co-directrice d’Ecolhuma

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EDUCATION

Florence Rizzo, Co-fondatrice & co-directrice d’Ecolhuma

Florence Rizzo est une femme de conviction qui s’est donnée pour mission de contribuer à la réduction des inégalités scolaires. Son engagement l’a conduite à créer Ecolhuma en 2012 pour accompagner celles et ceux qui peuvent réduire ces inégalités et créer une école épanouissante pour toutes et tous.

Pouvez-vous nous raconter ce qui a motivé votre parcours professionnel ?

Issue d’une famille modeste, j’ai réussi à suivre un parcours scolaire au sein de grandes écoles de l’Enseignement Supérieur en France. En 2004, j’ai choisi d’aller à l’ESSEC pour suivre le programme de la Chaire entreprenariat social qui venait d’être créée. Pendant mes études, je me suis souvent rendu compte que les grandes écoles entretenaient une forme de reproduction sociale même si l’ESSEC a beaucoup œuvré pour l’égalité des chances.

J’ai rejoint Ashoka pendant 6 ans au moment de son lancement en France. En 2010, je suis partie avec l’envie de travailler sur ce qui me semblait être à la racine du changement social : les questions d’éducation. J’ai passé deux années à investiguer les questions d’inégalités scolaires.

J’ai notamment appris qu’un enfant issu d’un milieu défavorisé a 4 fois moins de chance de faire partie des bons élèves et que la réussite d’un élève dépend à 30% de l’influence de son enseignant et à 10% du chef d’établissement. Cela a nourri ma conviction : si nous voulons réduire les inégalités, il faut aider les enseignants à faire réussir tous les élèves et notamment les plus fragiles.

A quels enjeux souhaitez-vous répondre avec Ecolhuma ? Quel bilan dressez-vous 10 ans après sa création ?

Nous voyons bien les limites du système méritocratique français qui ne permet que marginalement de compenser les inégalités de naissance. Si nous voulons que la France réussisse mieux et remonte dans les classements internationaux comme PISA, nous ne pouvons pas compter uniquement sur une élite. Il est donc urgent d’aider les enseignants à accompagner chaque enfant vers la réussite, Ecolhuma s’emploie à agir aux côtés des acteurs de terrain.

« Accompagner un enseignant, c’est changer la trajectoire de 1000 élèves et accompagner des centaines de milliers d’enseignants, c’est changer le système éducatif. »

En 2015, nous avons pris le virage du numérique en créant deux plateformes pour répondre aux besoins des enseignants et des chefs d’établissements : etreprof.fr a permis l’accompagnement de 120 000 enseignants et manageduc.fr, créée fin 2019, 5 000 chefs d’établissements ont été accompagnés (soit 1/4).

Concrètement, un enseignant découvrant à la rentrée qu’il a un élève dyslexique dans sa classe aura besoin d’aide pour comprendre ce qu’est la dyslexie et comment adapter son enseignement pour inclure cet élève. Les formations officielles interviendront souvent 12 à 18 mois après, si bien qu’avec EtrePROF nous essayons d’être réactifs et d’apporter des réponses à des besoins concrets avec bienveillance et dans une approche « entre pairs ».

Les enseignants entendent parler d’EtrePROF grâce au bouche-à-oreille et aux réseaux sociaux, ce qui ne nous empêche pas de nouer des partenariats avec certaines académies. L’idée par ailleurs est que notre action serve à prototyper certains éléments d’évolution des politiques publiques d’éducation.

Quel leader devons-nous être lorsque nous lançons une entreprise sociale ?

Avant tout, il est nécessaire d’être à l’écoute des besoins avec empathie et sans préjugé. Je dirais qu’il est aussi impératif de posséder certaines valeurs telles que la persévérance, l’humilité car nous ne savons jamais si nous avons trouvé la bonne réponse et la bonne réponse d’aujourd’hui ne sera pas celle de demain. Si nous ne nous remettons pas en question, nous finirons par devenir arrogant ou obsolète !

« J’aime bien l’idée de « servant leadership » : un leadership au service du collectif et du projet. J’aime à raconter aux nouveaux collègues qui nous rejoignent les erreurs que nous avons commises et ce qu’on en a appris ! »

Lorsque l’on entreprend, il est primordial de savoir bien s’entourer et de trouver des personnes à la fois alignées avec le projet, complémentaires et qui sauront mettre de côté leur égo.

Depuis 5 ans, vous co-dirigez l’association avec Stephen Cazade : pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?

J’ai conscience de mes forces mais également de mes limites ! Stephen Cazade a porté le développement d’UnisCité pendant plus de 10 ans. Il est capable de porter des stratégies ambitieuses de changement d’échelle.

Avant de co-diriger Ecolhuma, nous avions conçu ensemble différents projets et il avait soutenu bénévolement l’aventure d’Ecolhuma en tant qu’administrateur. Il y avait entre nous une confiance et un respect mutuels ainsi qu’une complémentarité de compétences. Il me semblait évident que nous pouvions porter plus haut le projet en associant nos forces et ce en total équivalence. Co-diriger devient une richesse dès lors que la vision est partagée et les compétences complémentaires.

« En réglant les problèmes d’ego, je crois qu’on gagne en pouvoir d’agir ! En tout cas, l’association Ecolhuma n’en serait pas là aujourd’hui sans son engagement et sa détermination. »

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