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8ème Rencontres Santé de Nice – « Systèmes de santé : n’oublions pas l’Humain ! »

Edito

SANTE / MEDICO-SOCIAL

En février 2014 se tenait au Québec un nouveau colloque dont l’objectif était de créer des échanges franco-québécois sur les sujets hospitaliers et ce en rassemblant professionnels et experts. Cet évènement marquait le lancement des Rencontres de Santé de Nice, dont la 8ème édition s’est tenue les 2 et 3 février derniers dans la ville éponyme. Fort de son succès, cet évènement est devenu un rendez-vous annuel majeur pour les acteurs des secteurs sanitaire et médico-social.

Son fondateur, Didier Haas, connaît particulièrement bien ces sujets après avoir consacré sa carrière professionnelle à la construction et la conduite de projets sanitaires et sociaux. Cette trajectoire a amené Didier Haas à travailler au sein de l’ARH (l’anciennement ARS) Pays-de-la-Loire où il a développé le schéma régional de l’organisation sanitaire (SROS), puis a créé la clinique Jules Vernes à Nantes dont il est ensuite devenu le directeur, avant de devenir le directeur général du Groupe Hospitalier Mutualité Française. Le dénominateur commun de ce parcours ? Un sincère engagement pour la santé et les enjeux sociaux qui motive Didier Haas à s’investir toujours plus et ce à l’image de son rôle d’administrateur délégué de l’association ORSAC.

Le thème de cette nouvelle édition relevait davantage d’un appel que d’un simple choix de sujet : « Systèmes de santé : n’oublions pas l’Humain ! », « un thème a priori si évident mais tellement lointain, alors que la crise déborde de partout » assure Benoît Péricard, coorganisateur des Rencontres et consultant sénior chez YourVoice, en ouverture des travaux. Dans un système sanitaire où la question de la prise en charge du patient est délaissée au détriment de l’étude organique et au sein duquel le numérique et l’IA modifient considérablement les pratiques, il apparaît nécessaire de rappeler que le soin ne peut se défaire du lien qui unit patients et soignants.

Visibilité difficile des patients, expériences des usagers, faire des patients des acteurs des politiques de santé ou encore soigner les soignants sont autant de sujets abordés lors des tables-rondes qui ont permis de souligner les différents enjeux inhérents à l’Humain dans le monde du soin. C’est dans ce contexte qu’Elisabeth Hubert (présidente de la FNEHAD) a réaffirmé l’attention que les infirmiers et les aides-soignants portent à la prise en compte personnalisée et humaine des patients.
A ce propos, Réjean Hébert (ancien ministre québécois de la Santé et des services sociaux entre 2012 et 2014) rappelle que le système de santé s’est développé sur un principe d’offre, si bien qu’aujourd’hui il est nécessaire de le repenser en fonction des besoins et en co-construction avec les usagers.

Didier Haas l’assure, cette 8ème édition a été un « franc succès », mais concrètement, que faut-il retenir ? Est-il seulement nécessaire de rappeler que le moral de ces acteurs est bas, en raison notamment des difficultés de recrutement et des conséquences persistantes du Covid ? Toutefois, l’ensemble de ces professionnels reste engagé et continue de travailler afin de proposer un système de soins plus efficient et prenant davantage en compte les besoins et les attentes de chacun.

Cette volonté de contribution et de collaboration de la part des professionnels est impérative : il ne faut pas tout attendre des politiques publiques. Le monde de la santé a un besoin urgent de décentralisation et de délocalisation. Les réussites locales existent déjà, mais l’urgence oblige à renforcer et accélérer ces innovations. Les professionnels connaissent leur secteur et leur territoire, faisons-leur confiance pour lancer de nouveaux projets qui pourront être repris ensuite par le gouvernement. Aussi, la nouvelle organisation de notre système de santé doit absolument redonner de l’autonomie aux équipes de soignants, faire de la place à l’innovation et ce tout en communiquant sur les bonnes pratiques.

A ce titre, Jean-Yves Grall (directeur général de l’ARS Auvergne Rhône-Alpes) défend la nécessité de lancer des expérimentations tout en prévoyant de les évaluer par la suite : « Il nous faut savoir relever les dysfonctionnements avec les usagers. Recruter les professionnels, c’est le nerf de la guerre. Nous pouvons donner envie en mettant en avant nos valeurs : l’accès à des soins de qualité et en sécurité sur les territoires. ». Fabrice Heyriès (directeur général de la MGEN) appelle quant à lui à favoriser l’écoute rappelant la persistance de tensions entre un secteur très encadré et le besoin de souplesse de l’ensemble des acteurs. Plus globalement, Anne-Marie Armantéras (présidente de l’ANAP) parle d’une « crise institutionnelle du management, de l’écoute » et défend une remise en cause, une construction des nouvelles modalités d’expression des usagers et des soignants en suivant le modèle du design thinking.

Des différents échanges tenus durant les Rencontres, nous retenons également, comme l’a rappelé avec regret Denis Robin (directeur général de l’ARS PACA), que la perte du sens chez les soignants devienne un sujet majeur. Selon lui, les valeurs d’engagement restent intactes mais les organisations ont été bousculées, mises en tension, empêchant de fait les soignants à réaliser des remontées de terrain. Il estime alors nécessaire de conserver « sa capacité à se scandaliser » et reconnait la difficulté à expliquer aux jeunes talents que le sens c’est l’engagement, la capacité à faire bouger les choses ou encore à apporter autre chose à autrui. A cela, Marie-Sophie Desaulle (présidente de la FEHAP) estime nécessaire de répondre aux préoccupations des jeunes notamment sur leurs marges de manœuvre entre autonomie d’actions et politique RSE de l’organisation.
La question de l’adéquation entre le numérique et l’humain se retrouve quant à elle dans le constat posé par Sophie Beaupère (déléguée générale d’Unicancer), les nouveaux talents du secteur cherchant à la fois l’excellence de la prise en charge et les innovations.

Qu’attendre pour la suite ? Didier Haas entend veiller à poursuivre et maintenir la féminisation (déjà à parité sur cette édition) et le rajeunissement des intervenants aux Rencontres Santé de Nice, mais surtout, il porte le vif désir de donner suite aux Rencontres, afin que cet évènement puisse être suivi d’effets tout au long de l’année au service des professionnels et des usagers.

Et comme le défendent Didier Haas et Benoit Péricard « ni bisounours, ni blasés, oui l’humain sera notre ADN pour de meilleurs soins et une meilleure santé ! ».

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