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Et si, demain mon métier n’existait plus ?

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INNOVATION, LE MONDE PROFESSIONNEL

Et si, demain mon métier n’existait plus ?

Pas une semaine sans articles sur l’IA qui nous interpellent quant à notre avenir professionnel à 5, 10, 15 ans, et nous obligent à nous projeter en tant qu’individus porteurs de valeurs et de compétences, de savoir-faire et de savoir-être. Fin août, l’ouverture d’un magasin sans caissier le dimanche nous a rappelé que le phénomène n’est pas nouveau.

En l’occurrence, il s’agit d’une étape supplémentaire dans l’automatisation des tâches, au même titre que les véhicules de nettoyage des espaces publics sans conducteur que l’on commence à apercevoir en Chine. Chaque époque a son lot de destruction et de création de métiers.

Cette fois-ci, l’IA menace non seulement des tâches répétitives susceptibles d’être robotisées, mais concurrence aussi les compétences dites intellectuelles.

Est-ce une si mauvaise nouvelle ?

Tout d’abord, nous avons largement prouvé notre capacité d’adaptation, d’agilité et de pluridisciplinarité. Contrairement à la génération précédente, les carrières linéaires, toutes tracées, sont devenues rarissimes.

Et puis, toute introspection est positive. Elle est l’occasion de nous demander ce que nous aimons faire. Embarqués dans nos parcours professionnels, nous avons trop peu l’occasion de nous poser cette question. La mise en danger des métiers actuels est l’occasion de nous interroger. « Si je ne devais garder qu’une ou deux facettes de mon métier, lesquelles choisirais-je ? Parmi mes compétences, lesquelles auront une valeur sur le marché du travail ? Lesquelles représenteront un avantage concurrentiel par rapport à d’autres candidats ; par rapport à la machine ? ».

Les hypothèses et projections qui nous sont proposées nous aident à orienter notre réflexion. Les new skills se dessinent autour de trois axes : des compétences liées à la maîtrise des nouvelles technologies ; des compétences 100 % humaines complétant les compétences de l’IA (et pour le moment non substituables) ; et une voie intermédiaire avec des professions à réinventer en y injectant des compétences en SI ou en analyse de data.

Prenons l’exemple du journalisme. Les ordinateurs ont prouvé leur capacité à rédiger des articles, certes faux, mais redoutablement crédibles. Un vrai danger pour nos démocraties qui montre de quelle manière le métier de journaliste va devoir se réinventer. D’ailleurs, peut-être est-ce l’occasion pour ce métier de retrouver sa vocation 1ère : être garant d’une information non manipulée. Dans L’IA va-t-elle aussi tuer la démocratie, le Dr Laurent Alexandre nous prédit des journalistes compulseurs de data dont le rôle sera essentiel : vérifier la véracité des informations. Si l’amour de la plume deviendra secondaire, les rôles d’investigation et de caution de « l’info vraie » seront sacralisés. Nous observons déjà la spécialisation de journalistes dans le fact checking. A n’en pas douter, ceux-ci vont consolider leurs compétences pour être en mesure d’analyser une montagne de données.

Les métiers du Marketing, déjà bien en phase avec l’intégration de l’IA pour connaître les consommateurs, devraient, quant à eux, renforcer la spécialisation entre les pros de l’analyse des comportements et leur anticipation, et les profils très créatifs non substituables.

Du côté de la médecine, déjà, en ophtalmologie et en radiologie, les machines posent des diagnostics plus fiables que l’homme, y compris à distance. Lorsque l’on connait les délais pour obtenir un rendez-vous dans certaines spécialités, il s’agit d’une véritable opportunité pour les patients. Cela ne devrait pas pour autant menacer la légitimité des médecins. Ceux-ci verront conforté leur rôle en termes de stratégie thérapeutique, en chirurgie, dans la recherche et, bien sûr, dans l’accompagnement humain des patients.

De sorte que, en plus de leur savoir-faire « classique », un grand nombre de professionnels devront acquérir une solide maîtrise des technologies de la robotique ou de l’IA, allant parfois jusqu’au paramétrage de ces machines. Ils’agira également de développer des compétences d’analyse globale afin d’être en mesure d’articuler et de donner du sens à la fois aux données et à des informations plus traditionnelles. Ainsi, le leader ou project manager d’un futur pas si lointain devra évoluer entre environnement réel et virtuel, entre indicateurs data (froids) et indicateurs humains (chauds), entre collaborateurs humains et machines ou bots. Il deviendra un chef d’orchestre à même d’harmoniser ce « travail d’équipe homme – machine », tout autant qu’une boussole pour la prise de décision.

Quel impact dans les RH ?

Dans un monde propice aux fake profils, à l’instar des journalistes, les recruteurs devront adopter une approche d’analyse et de vérification maximum de la robustesse des parcours. Bien sûr, il restera de la place pour l’intuition, mais à l’intérieur d’un panel d’outils, classiques ou innovants, permettant le plus possible d’objectiver les parcours et les personnalités : prises de références (la base), case studies, questionnaires, serious game…

Dans ce panorama, quelle sera la place de LinkedIn dans cette quête de véracité ? Partenaire incontournable, faux ami, ou concurrent ? A l’instar des réseaux sociaux, l’outil favorise les faux profils. S’il présente l’intérêt d’informer sur une ligne de vie professionnelle, il n’offre pas un certificat « Vérifié ».

LinkedIn peut également apparaître comme une menace avec son appétit vorace et ses velléités de grapiller des parts de marché aux cabinets de recrutement. Après tout, la société a l’avantage de tout savoir des candidats, mais aussi des recherches des recruteurs ; rien de plus facile pour démarcher les donneurs d’ordre. C’est précisément cet indispensable retraitement des informations par une vérification et une sensibilité humaine qui préservera les cabinets de recrutement d’une telle concurrence. Sans parler du fait que tout le marché du travail ne se trouve pas sur la plateforme (70 – 80 % des profils « seulement »). Confier un recrutement à LinkedIn seul équivaudrait, pour les entreprises, à se couper de 20 à 30 % des candidats potentiels.

Notre plus-value de recruteurs consistera à opérer une analyse fine des données brutes (CV, profils en ligne, tests, mises en situation…), mêlée à ce que nous indique à la fois notre expérience, notre perception du professionnel et notre intuition.

Car si l’on sait qu’aujourd’hui déjà, le robot peut noter l’individu (social, professionnel, citoyen, environnemental), comme en Chine ; et demain, pourra lire l’expression des visages encore plus finement, la force des cabinets de recrutement réside dans la mise en parallèle d’une évaluation objective du candidat avec des critères plus subjectifs, tels que l’adéquation entre le candidat et l’employeur, l’environnement de travail, les personnalités du N+1 et du DG.

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